03 mai 2019 |  Catégories : Non classé

Publié dans le journal le Devoir le 5 mars 2019 ainsi que dans le journal Metro, l’Avantage et le Huffington Post Québec.

Non pas l’abolition mais la séparation du cours ECR

Dès son lancement, le cours ECR a été considéré comme un programme bâtard par de nombreux observateurs qui s’y opposaient. Ce programme visait à réconcilier l’irréconciliable, c’est-à-dire, deux concepts totalement opposés de la nature humaine et de son développement.
Avant de complètement revoir, corriger et améliorer ce programme hybride comme le premier ministre et le ministre de l’éducation proposent, il faut avant tout séparer ces deux matières pourtant indispensable à une éducation fondamentale. Critiqué autant par des croyants que des non-croyants, ce programme résulte des pressions du lobby religieux et du Conseil des affaires religieuses qui ont fait reculer le gouvernement malgré la résistance de hauts fonctionnaires et d’une majorité de Québécois.
L’opposition acharnée du lobby religieux contre la séparation de l’éthique et de la culture religieuse est compréhensible. Les chefs religieux sont très conscients que dès que les démocraties offriront un véritable programme d’éthique fondé sur la nature humaine, les religions perdront progressivement leur raison d’être puisqu’elles se fondent sur un monde surnaturel.
Présentement, le ministre de l’éducation veut le laisser dans sa structure actuelle. Pourtant, ces deux volets relèvent de registres différents. Les intégrer dans le même programme d’enseignement est non seulement irrationnel mais immoral. C’est un crime contre la conscience des enfants et des adolescents qui sont en train de construire une carte mentale de la réalité, du monde, de la vie, d’eux-mêmes, de la société et de l’humanité qui devrait respecter la réalité et la raison.
Pour une espèce dont les nouveaux membres naissent humains qu’en potentiel, aucun programme de l’école obligatoire ne peut être plus crucial que celui de l’éthique, à la condition expresse qu’il soit fondé sur la primauté de l’humain et non de dieu et des institutions religieuses.
L’éthique doit enseigner aux enfants et aux adolescents à respecter avant tout la dignité inhérente à tout être humain. Et respecter sa dignité consiste essentiellement à connaître et à respecter les exigences de bon développement et de bon fonctionnement de son être dans ses rapports avec le réel, l’environnement, la vie, eux-mêmes, autrui, la société et l’humanité.
Pour enseigner à respecter sa dignité, l’éducation obligatoire devra offrir aux élèves un programme d’humanisation fondé sur une science et un art transdisciplinaires du développement humain qui n’existe pas présentement bien que nous ayons toutes les connaissances théoriques et pratiques pour les développer.
Le gouvernement actuel a une chance unique d’extirper le Québec du cul-de-sac politico-religieux dans lequel il est enlisé comme bien d’autres pays. Pour cela, le premier ministre et les ministres doivent être enseignants. Ils doivent expliquer au peuple québécois que seul un plus grand respect de la dignité humaine est susceptible d’unir l’ensemble de la société dans des projets au service du bien commun.
Il faut surtout cesser de nous diviser et de gaspiller des sommes astronomiques de temps, d’énergies et d’argent qui devraient servir plutôt à améliorer les services communs comme l’éducation et la santé.
Gaston Marcotte
Professeur associé à la Faculté des sciences de l’éducation de l’Université Laval Président-fondateur du Mouvement Humanisation