LA DIGNITÉ HUMAINE
Vaccin contre
la discrimination
© Gaston Marcotte 2020
Introduction
Le Mouvement Humanisation dont je suis le président-fondateur a comme mission sociale de faire respecter le droit naturel et inaliénable des enfants et adolescents à une éducation et à une éthique humanisante qui n’existent pas présentement.
Les pages qui suivent visent à démontrer à partir d’une caractéristique essentielle de la commune nature des êtres humains qu’ils sont tous dignes d’un respect inconditionnel. Par conséquent, toutes les formes de discrimination ne sont pas respectueuses de la dignité inhérente à tout être humain. Voilà pourquoi, je vous propose une solution préventive et innovante, peu coûteuse et efficace à long terme à ce mal qui ronge les sociétés depuis trop longtemps.
À la recherche d’une valeur absolue
Grâce à l’apparition du néocortex, les humains développèrent progressivement une conscience réflexive et créatrice capable de se projeter dans le passé comme dans le futur. Voilà pourquoi certains d’entre
eux ont cherché sans répit un fondement pouvant donner un sens global et une direction concrète à leur vie personnelle, sociale et écologique.
Au fil du temps, les humains ont accordé une grande valeur à différents éléments (tableau 1), convaincus d’avoir trouvé la réponse à leur questionnement existentiel.
Tableau 1
Éléments auxquelles les humains ont accordé une grande valeur, voire sacralisés
Cosmos Pays
Nature Nation
Tradition Idéologie
Dieu Peuple
Âme Argent
Esprit Pouvoir
Ethnie Renommée
Culture Héros
Race Chef militaire
Apparence Dictateur
Guide spirituel Etc.
Ces éléments que les humains ont eu tendance à sacraliser dans l’espoir d’augmenter leur pouvoir individuel et collectif sur leurs semblables les ont depuis toujours divisés et soulevés les uns contre les autres. Aujourd’hui, ces conflits incessants menacent non seulement la qualité de vie de tous les humains mais la survie même de leur espèce.
Tous les animaux défendent instinctivement leur vie comme leur bien le plus précieux. Avec le développement de la conscience, certains humains eurent l’intuition de la nature exceptionnelle de leur espèce comparativement au règne minéral, végétal et animal. Ils accordèrent progressivement à leur vie personnelle une dignité.
Avant le développement des langues, des écritures, des arts, des sciences et des technologies, les primates ne disposaient que de leurs instincts, leurs pulsions, leurs sensations et leurs émotions pour comprendre la réalité et s’y adapter. Tout au long de leur évolution, les humains ont développé différents moyens pour connaître et s’adapter à la réalité dont ils sont une propriété émergente. On a qu’à penser à tous les outils matériels et mentaux que les scientifiques se sont donnés pour y parvenir.
Le respect de la dignité humaine comme solution
En 1945, cinquante pays se réunirent à San Francisco et adoptèrent la Charte des Nations Unies. Le but de cette organisation internationale et de
sa charte était de sauver les générations futures des fléaux des guerres à la suite des deux guerres mondiales qui avaient bouleversé l’humanité dans ses fondements. Dans son préambule, la charte réaffirme la foi dans les droits fondamentaux, dans la dignité et la valeur de la personne humaine ainsi que dans les droits égaux entre les hommes et les femmes. Elle vise à favoriser le progrès social et à instaurer les meilleures conditions de vie dans une liberté plus grande.
En 1948, les 58 États membres de l’Organisation des Nations Unies adoptèrent la Déclaration universelle des droits de l’homme. Cette déclaration politique est la première affirmation universelle de la dignité humaine et de l’égalité inhérente à tous les êtres humains. Le premier considérant du préambule de ce document historique avance que « la reconnaissance de la dignité inhérente à tous les membres de la famille humaine et de leur droits égaux et inaliénables constitue le fondement de la liberté, de la justice et de la paix dans le monde ». Le premier article découlant de ce considérant affirme que « tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droit. Ils sont doués de raison et de conscience et doivent agir les uns envers les autres dans un esprit de fraternité ».
En fondant la Déclaration universelle des droits de l’homme sur la dignité humaine, l’ONU venait d’affirmer publiquement la primauté de l’humain sur toutes les idoles, y compris les dieux, auxquels les humains s’étaient assujettis tout au long de leur évolution.
Cette première déclaration fondée sur la dignité humaine n’a pas, à ma connaissance, justifié ni défini à ce jour, les fondements de cette dignité qu’elle accordait à tout être humain. Le concept est donc demeuré flou donc malléable. La prochaine section apporte un éclairage nouveau sur la question du fondement de la dignité humaine.
L’être humain : unique valeur intrinsèque absolue
Compte tenu des caractéristiques de la vie humaine (tableau 2), l’humain
est naturellement une fin en soi, donc à soi-même sa valeur absolue, son bien suprême.
Tableau 2
Caractéristiques de la vie humaine
Autoproductrice
Auto-éco-organisatrice
Autorégénératrice
Autotransformatrice (évolution de l’espèce)
Auto-actualisatrice (développement de la personne)
Autoreproductrice
Autodégénératrice
Ce qui est une valeur intrinsèque absolue est sacré (au sens laïc du mot), et digne d’un respect inconditionnel. C’est pourquoi il faut en toutes circonstances traiter l’humain comme une fin en soi, jamais simplement comme un moyen.
Cette dignité inhérente à tout être humain découle du fait que seuls les êtres humains, grâce à leur conscience réflexive et critique, sont capables de devenir conscients qu’ils sont leur propre fin, donc à eux-mêmes leur valeur absolue. Ils peuvent donc agir en conséquence dans toutes leurs activités s’ils ont été éduqués en conséquence.
La vie étant sa propre fin, elle est donc nécessairement autoréférentielle. C’est-à-dire qu’elle doit tirer de son organisme (être) ses exigences de bon développement et de bon fonctionnement ainsi que les normes (valeurs, droits, devoirs, règles, etc.) naturelles et culturelles qui guideront ses comportements personnels, sociaux et écologiques.
L’humain est donc, de par sa nature, l’unique fondement de toutes les normes qui guident ses comportements individuels et collectifs dans ses nombreux rapports (tableau 3).
Tableau 3
Éléments avec lesquelles les humains interagissent
Réel
Environnement
Vie
Soi-même
Autrui
Société
Humanité
Il est vital et urgent que les humains accordent à leur être la primauté plutôt qu’aux idoles (voir tableau 1) qu’ils ont sacralisées tout au long de leur histoire et au nom desquelles ils ont commis les horreurs que l’on connaît. S’ils en étaient conscients, ils pourraient s’attaquer à la source principale de toutes les formes de discrimination qui écrasent sans répit des milliards d’humains dans le monde, c’est-à-dire le non-respect de leur dignité.
Compte tenu de la primauté qu’on devrait accorder à l’humain, il est important de bien définir le concept de la dignité humaine. La définition qui suit, est celle utilisée par le Mouvement Humanisation.
Dignité humaine :
Une valeur intrinsèque absolue, digne d’un respect inconditionnel, qu’un être raisonnable attribue à sa vie et à celle d’autrui dès qu’il prend conscience qu’il est, de nature, une fin en soi, donc à soi-même son bien suprême.
La dignité humaine est donc le fondement de tous les piliers (tableau 4) par lesquels des transformations individuelles, sociales et écologiques durables peuvent s’implanter dans une société pluraliste qui se veut démocratique.
Tableau 4
Piliers d’une société respectueuse
de la dignité humaine
Éthique humanisante Éducation humanisante
Droit Devoir
Liberté Égalité
Fraternité (respect) Science (vérité)
Autonomie/Responsabilité Humanisme
Démocratie Laïcité
Féminisme Institutions publiques
Pour un être conscient qu’il est sa propre fin, et qui naît inachevé, rien ne peut être plus important que d’apprendre, au moment propice et au moyen d’outils pédagogiques appropriés, pourquoi et comment respecter sa dignité.
De fait, tout être humain a, de par sa nature inachevée, un droit naturel et inaliénable à une éducation humanisante fondée sur sa nature et ses exigences de bon développement et de bon fonctionnement dans ses rapports avec le réel, l’environnement, la vie, lui-même, autrui, la société et l’humanité. Or, ce droit primordial ne peut pas être respecté présentement puisqu’il n’existe pas de programme d’humanisation fondé sur une science et un art transdisciplinaires du développement humain.
Pourtant, l’humanité possède actuellement suffisamment d’experts, de connaissances théoriques et pratiques, d’institutions publiques, d’argent et de technologies pour élaborer de véritables programmes d’humanisation et les diffuser à la grandeur de la planète. Le non-respect de ce droit primordial doit donc être considéré à l’avenir comme le premier crime contre l’humanité puisque tous les autres en découlent directement ou indirectement.
Conclusion
Dans le Devoir du 5 juin 2020, le professeur Patrick Cloos de l’Université de Montréal estime que « … l’un des grands défis qui se pose à nos sociétés est la manière de se débarrasser du racisme… ».
Ne serait-il pas judicieux et opportun que le Groupe d’action contre le racisme propose au gouvernement du Québec de faire de la dignité humaine le vaccin par excellence contre tous les types de discriminations, dont le racisme ?
Un tel rapport qui s’attaquerait non seulement aux effets mais également aux causes premières de la discrimination prendrait alors une envergure qui dépasserait les frontières puisqu’il s’attaquerait à l’une des causes principales de la pauvreté, de la misère et de la souffrance dans le monde : l’incapacité des humains à respecter leur dignité
Gaston Marcotte
Président-fondateur du Mouvement Humanisation
Professeur associé à la Faculté d’éducation de l’Université Laval
N.B. L’auteur tient à remercier le sociologue Roger Boileau de l’Université Laval et Annie Pellerin directrice du Mouvement Humanisation qui ont amélioré, grâce à leurs critiques, le présent document.